Le canal lombaire étroit

RAPPEL ANATOMIQUE

Le canal lombaire normal

Il existe au niveau de la colonne vertébrale lombaire trois canaux : le canal central ou foramen vertébrale, le récessus latéral (portion latéral du canal central ou trou de conjugaison, également appelé foramen latéral, mais aussi foramen tout court en langage courant) et le foramen intervertébral. Les parties molles – Ligaments jaunes, capsules, ligaments longitudinal dorsal – peuvent participer à la compression.

Les niveaux les plus touchés par ordres de fréquence sont L4/L5, l3/l4, et, le plus rarement, L2/L3 ou L5/S1.

Canal lombaire étroit ou rétréci :

Une définition simple

Le canal lombaire étroit ou rétréci est défini anatomiquement par une réduction du canal lombaire se caractérisant par une perte de réserve épidurale responsable de compression des structures nerveuses et vasculaires et cliniquement par un syndrome douloureux radiculaire.

UNE PATHOGENIE COMPLEXE

La pathogénie du CLE est complexe et n’est pas complètements élucidée. Elle associe probablement plusieurs facteurs : anatomique (statique et/ou dynamique), biochimique, neuropathique et vasculaire. Ceci explique la variété des symptômes, l’évolution imprévisible et l’absence de corrélation anatomo-clinique.

Un processus dégénératif lent

Dans la majorité des cas, le CLE correspond à un processus dégénératif, lié au vieillissement naturel de la colonne vertébrale lombaire. Le CLE peut ainsi être associé à un spondylolisthésis dit dégénératif. Le canal lombaire étroit dégénératif comprend des lésions de l’ensemble des constituants du segment mobile. Les lésions arthrosiques sont responsables du rétrécissement du canal lombaire : protrusion discale, ostéophytes disco-somatique ou articulaire postérieure, hypertrophie ligamentaire ( ligament jaunes, interlamaire).

L’évolution est progressive et se déroule en plusieurs étapes : elle débute par des fissurations discales ou de micro-déchirure capsulaires, suivies d’un pincement discal qui entraine l’apparition d’ostéophytes. Au dernier stade, il existe une hypertrophie des articulations, un épaississement des ligaments et des capsules articulaires. Ces phénomènes dégénératifs touchent autant le canal central que les récessus latéraux et les foramens intervertébraux.

En principe, on admet une sténose canalaire lorsque le diamètre sagittal du canal est inférieure à 10 mm sur la ligne médiane. Les mesures de la surface sont de plus en plus utilisées, mais leurs variations sont assez larges chez les sujets asymptomatiques (86 à 230mm²)

La sténose peut être localisée dans le canal rachidien, elle est alors centrale ou foraminale, ou être localisé dans les récessus latéraux ou, encore, être diffuse. Elle peut intéresser un seul étage ou plusieurs.

La station debout entraine un bombement des éléments ligamentaires dans le canal, ce qui en réduit les dimensions et permet de comprendre pourquoi les symptômes sont majorés dans cette position. Pour diminuer la gêne les patients ont ainsi tendance à marcher en position plus ou moins entéléchie.

LES ASPECTS CLINIQUES

Claudication intermittente et syndrome postural sont caractéristiques.

Le CLE symptomatique concerne généralement des patients de plus de 60 ans. D’évolution lente, les symptômes sont présents en générale depuis des années avant que le patient ne se décide à consulter en raison de l’augmentation de leur intensité. Des lombalgies sont présentes dans 90% des cas, mais leurs absence n’exclut pas le diagnostic.

  • La claudication intermittente ou la claudication radiculaires : les patients se plaignent de radiculalgies uni ou bilatérales apparaissant ou s’exacerbant âpres 5 à 10 minutes de marche et obligeant l’arrêt. Elles peuvent aussi être déclenchées par la station debout prolongée. Elles cessent après 5 à 10 minutes de repos et réapparaissent âpres un temps de marche identique. Ce périmètre de marches est assez constant pour un même malade. Les symptômes sont mal systématisés, ils sont d’avantage pénibles que franchement douloureux et souvent qualifiés de bizarres : douleurs, sensations de lourdeur, fourmillement des membres inférieurs de topographie diffuse pouvant s’accompagner de crampes. Les topographies radiculaires de la douleur ou des paresthésies peut être sciatique, crurale ou périnéale.
  • Syndrome postural : la station assise, la position antéfléchie ou l’accroupissement soulage rapidement le patient. Une attitude de cyphose antalgique peut être à l’ origine d’une démarche «  penchée en avant ». Les difficultés à la marche décrites par le patient disparaissent lorsqu’il pousse un caddie. (signe du caddie) a noter que la bicyclette peut être pratiquée longtemps alors que le périmètre de marche est déjà réduit.

Dans 10 à 30 % de cas moins sévères, une simple radiculalgie à la marche n’imposant pas l’arrêt remplace la claudication intermittente

Très rarement, le CLE est associé à une symptomatologie urinaire à la marche qui peut égarer le diagnostic, dysurie, pollakiurie, mictions impérieuses, incontinence ou érection à la marche.

Ces symptômes sont rares mais très évocateurs quand ils surviennent à la marche.

Un examen pauvre malgré des symptômes importants.

  • L’examen rachidien : il est souvent pauvre et peu spécifique.

L’inflexion latérale antalgique souvent présente en cas de pathologie discales est rare en cas de CLE. L’impulsivité à la toux est absente . Il n’existe pas de signe de Lasségue. L’hyperextension du rachis réveille la douleur.

  • L’examen neurologique : il est également peu spécifique. Il doit être fait à la fois au repos et âpres exercice, puisque les signes neurologique ne peuvent être présent qu’âpres la marche, notamment les troubles moteurs qui en général sont discrets. La souffrance radiculaire intéresse le plus souvent plusieurs racines et les troubles de la sensibilité couvrent généralement plusieurs territoires.

L’abolition ou la diminution des reflexe achilléen et/ou rotulien n’est pas contributive.

  • L’examen des hanches est essentiel, car une coxarthrose uni ou bilatérale peut simuler un CLE ou y être associé.
  • Attention : les plaintes des patients sont souvent importantes alors que l’examen clinique est pauvre. Cette discordance peut être à l’origine d’une erreur à ne pas commettre : penser qu’il s’agit de troubles fonctionnels, voire imaginaires !

Des paresthésies des membres inferieurs sont possibles : brulures, engourdissement, fourmillements, picotements. Ces sensations surviennent surtout en station debout prolongée immobile et paradoxalement sont améliorées par la marche. La « lourdeur lombaire » est également améliorée par le mouvement. L’artérite représente le principale diagnostic différentiel, mais elle est assez simple à éliminer. En pratique, une claudication avec pouls conservés est, a priori, un canal lombaire étroit.

LES CRITERES DIAGNOSTIQUE

Les lésions observées en imagerie moderne sont en rapport avec le vieillissement et l’usure, mais n’ont pas forcément de caractère pathologique ; seule l’association de lésions anatomique et symptômes neurologique concordants, fera parler de canal lombaire étroit dégénératif.

  • Les radiographies standard sont sans intérêt. L’imagerie est réservée généralement aux patients destinés à être opères.
  •  Le scanner en position couchée est l’examen de dépistage le plus simple lorsque le diagnostique de CLE est évoque. Il faut demander des coupes de chaque étages lombaire de L1 a S1. L’étroitesse du canal correspond à un diamètre sagittal antéropostérieur inferieur à 12 mm (normale supérieure à 15 mm) et sur une coupe passant par les disques : par un diamètre transversal interarticulaire inferieur a 15 mm.
  • L’IRM, en séquence en T2, permet d’obtenir des images de type myélographique sans injection. La détermination des contours osseux et de la sténose est moins bonne qu’avec le scanner, mais les parties molles sont mieux définies.

Un progrès : jusqu’à présent, seule la saccoradiculographie permettait de faire des clichés debout, permettant de bien voir le rétrécissement canalaire en charger voire en hyperextension. L’apport de l’IRM, possible sur de nouvelles machines en position debout, semble pouvoir remplacer cette imagerie avec injection qui nécessitait une ponction lombaire. 

LE TRAITEMENT EST D’ABORD MEDICAL

L’évolution vers l’aggravation n’est pas systématique, la symptomatologie est fluctuante. Son but est d’informer le patient et de le rassurer, de soulager les douleurs, de restaurer la fonction pour permettre de vivre normalement.

L’information doit éviter les termes équivoques comme « instabilité », « vertèbres déplacées », « hyper ou hypo-mobilité », « glissement de vertèbres ».

Les patients on le droit de comprendre leur maladie, sa gravité, son pronostic, les incertitudes et les options thérapeutiques. Pour cela, le jargon technique doit être évité et il est nécessaire de vérifier la compréhension et l’agrément du patient.

– Soulager la douleur

Les antalgiques de palier I ou II sont recommandés. Les AINS ne semblent pas plus efficace que les antalgiques, ils ne doivent pas être prescrits au long cours. Les myorelaxants ne sont as recommandés : Ils exposent au risque de chutes et il n’existe aucune preuve de leur efficacité.

Les infiltrations sont largement utilisées lorsque les antalgique ou les AINS ne sont pas efficaces. La voie épidurale est utilisée, selon diverses modalités de voie d’abord.

L’acupuncture n’a aucune efficacité démontrée. Les manipulations ne sont pas recommander dans cette indication.

Les antidépresseurs et les anticonvulsivants qui sont utilisé dans le cadre du traitement d’une douleur chronique n’ont pas fait l’objet d’études dans le canal lombaire rétréci.

– Restaurer la fonction

Le principe de base de la rééducation est de favoriser les exercices en flexion et de l’associer au traitement médicamenteux.

L’immobilisation par corset est possible en phase aiguë.

– Que penser du traitement chirurgical ?

Le principal geste chirurgical est celui de la décompression effectuée soit par laminotomie, soit pas laminectomies. La chirurgie n’est qu’exceptionnellement une urgence.

La lombalgie seule, même en présence de sténose radiologique, n’est pas une bonne indication chirurgicale. La chirurgie est réservée au CLE très gênants après échec des traitements médicamenteux.

Le traitement chirurgical est plus efficace à court termes (1 à 4 ans) que le traitement médical.

A plus long terme (8 – 10 ans), les bénéfices de la chirurgie sont moins évidents, puisque l’amélioration du symptôme le plus gênant et de la lombalgie s’observe chez la moitié des patients qu’ils aient été opérés ou non. Apres 10 ans, le taux de satisfaction des patients est identique âpres traitement médical ou chirurgical, sauf dans le CLE sévères ou la chirurgie est plus efficace. La décision opératoire ne peut être envisagée que par une équipe très spécialisée. Une revue systématique de la littérature ne prenant pas en compte que les études randomisées, comparatives et prospectives montre notamment qu’une bonne capacité de marche opératoire prédit une meilleure capacité de marche a 2 ans et une meilleure satisfaction des patients, qu’un état dégressif préalable est un facteur de mauvais pronostic de la chirurgie ainsi qu’une importante morbidité cardiovasculaire. La présence d’une sténose importante ≤ 6 mm prédit moins de douleur à 5 ans. Par ailleurs, on sais que 20% des patients vont présenter à nouveau une sténose, soin au niveau opéré, soit au-dessus de la région décomprimée.

Au total, le traitement médical ou chirurgical améliore l’état des patients avec le temps, mais leurs résultats ne sont pas totalement satisfaisants.