Les fractures de la jambe

Les fractures de la jambe
Mécanisme, diagnostic, principes du traitement

Fractures extra-articulaires, intéressant les deux os de jambe dans la majorité des cas ; 1/3 sont ouvertes. Souvent, il s’agît d’un traumatisme intéressant l jambe seule ; parfois, il fait partie d’un polytraumatisme.

I/ Mécanisme

Le mécanisme est souvent direct, la fracture siégeant au niveau de l’impact (AVP, « pare-chocs »), avec fréquentes lésions cutanées. Rarement, il est indirect par torsion, voire flexion, du membre (la fracture est à distance de l’impact) avec rares lésions cutanées. 

II/ Diagnostic clinique

A/ Signes fonctionnels

  • Douleurs
  • Impotence fonctionnelle totale du membre.

B/ Inspection

Déformation pouvant associer :

– une angulation

– un raccourcissement

– une rotation externe du pied.

C/ Palpation (à éviter)

Elle retrouverait une mobilité anormale très douloureuse avec une crépitation osseuse.

Un bilan articulaire du genou et de la cheville est systématique.

D/ Recherche de complications immédiates :

  • Cutanées: l’ouverture est une complication majeure, porte d’entrée à l’infection. Les lésions sont classées selon Cauchoix. Il faut insister sur les risques propres des contusions et des décollements cutanés. Elles dominent le pronostic et le traitement.
  • Musculo-périostées: déchirures, contusions, dévitalisation du périoste sont sources d’hématomes, d’infection et de retard à la consolidation. Un hématome intra-aponévrotique sous tension favorise une ischémie musculo-nerveuse (syndrome des Loges).
  • Nerveuses: rares ; il s’agît de compression, contusion ou section du nerf sciatique poplité externe et/ou tibial postérieur.
  • Vasculaires: plus rares encore, il s’agît de compression, contusion, ou de rupture. Graves, quand elles atteignent l’artère poplitée ou le tronc tibio-péronier, elles menacent alors la vitalité du membre.
  • Polytraumatisme.

III/ Diagnostic radiologique

A/ Technique

Jambe face + profil prenant le genou et la cheville.

B/ Résultats

  • Le trait siège le plus souvent au niveau du tiers moyen. Il peut être transversal, spiroïde (pouvant détacher un fragment en aile de papillon), oblique (court ou long), bifocal isolant un fragment intermédiaire, voire comminutif avec traits de refend fréquents. Rarement, il se situe au niveau du tiers supérieur (fracture sous-tubérositaire) ou inférieur (fracture supra-malléolaire). Il doit alors faire rechercher un trait de refend articulaire.
  • Le déplacement, plus ou moins important, associe : angulation, translation, rotation, chevauchement et raccourcissement.
  • Au total, on distingue d’une part, les fractures simples à 2 fragments, ou complexes à plusieurs fragments, et d’autre part, les fractures stables (transversales et obliques courtes) ou instables (obliques longues, spiroïdales, bifocales et comminutives).

IV/ Diagnostic évolutif

A/ Evolution favorable

Correctement traitées, elles consolident dans la majorité des cas, avec des délais variables de 3 à 6 mois, selon leur type, leur siège, l’existence de lésions cutanées, le traitement entrepris et le terrain.

B/ Complications précoces

  • Infection: complication redoutable, essentiellement le fait des fractures ouvertes ; il faut distinguer les manifestations aiguës, de diagnostic facile, des manifestations torpides, camouflées le plus souvent par une antibiothérapie.
  • Déplacement secondaire: se voit dans les fractures instables traitées orthopédiquement. Il peut bénéficier d’une gypsotomie ou d’une ostéosynthèse (si l’état cutané le permet). A part, le déplacement en varus des fractures isolées du tibia.
  • Nécrose cutanée: initialement, la vitalité de la peau est parfois difficile à apprécier et certaines zones contuses et décollées vont évoluer vers une nécrose secondaire.
  • Syndrome de loge: annoncé par des douleurs, l’examen note une induration, une tension de la loge (douloureuse à la pression) ainsi qu’un déficit sensitivo-moteur. Le traitement (aponévrotomie) est d’une extrême urgence.
  • Polytraumatisme.
  • Complications thrombo-emboliques.

C/ Complications tardives

  • Retard de consolidation: favorisé par l’ouverture du foyer, une contention insuffisante, ou un mauvais état général.
  • Pseudarthrose aseptique: elle se traduit par une douleur à l’appui, une mobilité plus ou moins indolore et une esquive à l’appui. Radiologiquement, il y a une absence de cal osseux avec persistance d’un écart interfragmentaire.
  • Cal vicieux: le plus souvent dû à un mauvais traitement initial, voire un déplacement secondaire. On distingue les cals vicieux bien tolérés (en baïonnette avec un raccourcissement inférieur à 2 cm), des cals entraînant une mauvaise tolérance (cals en rotation ou angulaires retentissant sur le genou et la cheville).
  • Troubles trophiques: très fréquents, favorisés par une longue immobilisation. Il peuvent se manifester au niveau :

  – Cutané : rétraction, oedème, adhérences.

Musculaire : amyotrophie, rétraction tendineuse (fléchisseurs des orteils, tendon d’Achille).

     – Osseux : ostéoporose, raideur de la cheville, trouble de la statique du pied.

  • Ostéite chronique : caractérisée par des signes généraux discrets (fébricule, asthénie) et surtout locaux (fistules avec écoulement séropurulent). Radiologiquement, le foyer est consolidé mais il existe d’importants remaniements osseux à type d’ostéolyse, de géodes, d’épaississement périosté et de séquestres.
  • Pseudarthrose suppurée: complication la plus redoutable : elle associe une absence de consolidation à une ostéite.

V/ Principes du traitement

– Urgence traumatologique, le problème cutané est au premier plan.

– Toute fracture de jambe déplacée menaçant la peau doit être réduite d’urgence.

– Le traitement anticoagulant est systématique jusqu’à appui complet.

A/ Traitement de la plaie

  • Parage des parties molles et du revêtement cutané.
  • Fermeture cutanée sans tension.
  • Antibiothérapie et séroprophylaxie antitétanique systématiques.

B/ En cas de fracture fermée

  • Le traitement orthopédique par plâtre cruro-pédieux est indiqué en cas de fractures sans déplacement ou stables après réduction orthopédique. Il est à conserver 2 à 3 mois environ (pouvant être remplacé par une botte plâtrée après 6 à 8 semaines).
  • Le traitement chirurgical est réservé aux autres cas (ou systématique pour certains). On pratique chaque fois que possible une ostéosynthèse à foyer fermé (enclouage centro-médullaire) plutôt qu’à foyer ouvert (vis, plaque vissée).

C/ En cas de fracture ouverte, type I ou II

  • Plâtre fenêtré dans les fractures non déplacées ou stables après réduction,
  • ou enclouage centro-médullaire le plus souvent (voire dans certains cas fixateur externe).

D/ En cas de fracture ouverte, type III

  • Fixateur externe.